On en parle
Faut-il prendre le train des "alicaments"
L'agriculture et l'industrie ont vécu une évolution récente avec l'émergence de l'industrie des ingrédients ou Produits Alimentaires Intermédiaires. Il s'agit d'une division des produits agricoles en leurs composants qui seront fournis à l'industrie alimentaire, laquelle devient alors assembleur pour composer des plats préparés prêts à consommer.
A l'avantage des IAA, cette succession d'opérations crée doublement de la valeur ajoutée : en amont par le processus de séparation des aliments en ingrédients puis, en aval, par l'assemblage en plats préparés. Que penser aujourd'hui du développement important de l'industrie des aliments dits « nutraceutiques» ou « alicaments » ? Pour rappel, il s'agit d'aliments formulés avec certaines molécules aux vertus identifiées comme salutaires, ceci à des fins de préservation de la santé ou de l'esthétique.
Faut-il en prendre le train ? Peut-on avoir une alimentation enrichie en dehors d'une prescription médicale. Hormis le domaine pharmaceutique, très encadré, la recherche de la beauté et de la santé par des aliments ad hoc est-elle autre chose qu'un argument commercial ?
Il faut distinguer les aliments banaux, simple matrice support, auxquels on ajoute un composant à effet bénéfique (vitamine C, oligo-éléments), des aliments complets qui développent leur propre valeur nutritionnelle (yaourt fermenté par le bifidus, œuf naturellement riche en Omega-3).
Cette distinction est d'autant plus notable qu'un composant dit bénéfique n'agit bien que dans un contexte et par synergie avec d'autres composants, quand ce n'est pas sa forme naturelle qui est la seule active.
L'industrie alimentaire a l'expérience des paradoxes qu'elle résout de façon plus ou moins heureuse : image de terroir donnée à des produits issus d'usines nécessairement modernes, augmentation du taux d'obésité liée à un discours contradictoire (consommez-maigrissez), aliment allégé incitant indirectement à une surconsommation.
Prenons donc le train de l'innovation, de la préservation de la qualité initiale des aliments notamment les fruits et légumes, par des filières technologiques douces. Mais gardons-nous de nous fourvoyer dans des démarches purement commerciales.